mercredi 15 juin 2022

Lectures d'une nuit d'hiver (janvier à mars 2022)


Cela faisait quelques heures que la nuit, déjà, était tombée. Il faisait froid, la brise hivernale avait déposé de glacials baisers sur le rebord de la fenêtre près de laquelle vous vous teniez, emmitouflé sous un épais plaid et enserrant fermement, tel un trésor réconfortant, la boisson chaude qui vous servait alors de compagnon pour la nuit. Bien installé, l'esprit un peu rêveur et prêt à s'égarer dans d'inconnues contrées, vous aviez ouvert un livre, armés pour affronter les affres d'un nouveau voyage ... 


Bonjour, cela fait longtemps ! Si je n'ai pas été très présente sur le blog l'année passée, c'était davantage par contraintes professionnelles que par désintérêt, car les mois passés ont été riches en belles découvertes enflammant toujours un peu plus une passion qui n'a jamais manqué de bûches à consumer. Les amateurs sont unanimes sur ce fait : 2021 aura été une année exceptionnelle pour le manga, que ce soit en termes de ventes tout comme de par ses sorties toujours plus nombreuses, le retour inespéré d'artistes ayant déserté les étagères de librairies depuis bien trop d'années ou encore des titres que l'on n'aurait jamais simplement espéré tenir dans nos mains avides de nouveaux périples. Dans cette plaisante euphorie quelque peu submergeante, je me suis souvent perdue et, dans un même temps désireuse de parfaire ma culture manga, j'ai surtout lu beaucoup de "vieux" titres qui ont longtemps attendu dans un petit coin de ma tête en ébullition. Si je ne suis donc peut-être pas très au fait avec les récentes sorties, j'espère que ce petit échantillon des lectures qui ont égayé les trois premiers mois de mon année sauront vous inspirer et éveiller votre curiosité. 

Les éditeurs ont frappé fort dès le début d'année avec une multitude de nouveautés alléchantes. Si j'ai cédé à plusieurs d'entre elles, j'en ai pour le moment lu assez peu, malgré toutes mes bonnes résolutions propres à l'arrivée d'une nouvelle année. Néanmoins, ces dernières ont toutes été d'agréables lectures qu'il me tarde de prolonger avec les tomes suivants. En voici une sélection !

🌙 Nouveautés 2022 ⭐ 

La danse du soleil et de la lune, manga de MATSUURA Daruma, 2 tomes publié aux éditions Ki-oon (en cours - 7€90 l'unité)
 
Konosuke est un samurai fauché et jouissant d'une mauvaise réputation et pour cause : à son contact, le métal se tord automatiquement, une véritable honte pour le guerrier qui ne peut même pas dégainer de sabre. Acculé et haï par ses pairs, Konosuke se laisse dépérir alors qu'il est sauvé par une mystérieuse jeune femme. Une fois réveillé, il découvre qu'il est désormais fiancé avec une sublime femme, dont il ne connait rien. Qui est-elle et pourquoi a-t-elle choisi un samurai déshonoré tel quel lui ?

     Parmi les (trop nombreuses) nouveautés de ce début d'année figurait La danse du soleil et de la lune, marquant le retour de la talentueuse autrice Daruma MATSUURA, à qui l'on devait déjà en France le séduisant thriller Kasane. Ce dernier m'ayant particulièrement tenu en haleine et surtout retenu mon attention pour la beauté hypnotique de son trait, j'étais très curieuse et impatiente de découvrir ce que pouvait proposer l'autrice dans un registre qui lui était jusqu'alors étranger. Subjuguée, j'ai été dans l'obligation d'affirmer que le talent fait indéniablement partie du trousseau de la mangaka. 

    Dès les premières lueurs de la série, le scénario se fait engageant, on ne peut plus énigmatique et l'on se met à tourner les pages frénétiquement, dans l'espoir d'apercevoir une ébauche de réponse quant aux mystères de la chair maudite de Konosuke. Plus encore, l'élégante fiancée m'a fascinée et j'étais sans cesse ramenée aux ambigus regards qu'elle porte à notre malchanceux samurai. Qui est-elle, comment connait-elle Konosuke et pourquoi avoir choisi ce faux samurai dans la tourmente comme époux ? Tandis que ses mobiles ne semblent pas être prêts à se dévoiler, la mangaka place dans un premier temps son couple au plus près du lecteur et fait évoluer son protagoniste au contact de Tsuki, sa belle épouse. Léger et touchant, le quotidien des époux est amusant à suivre, rendant le dernier chapitre du tome plus surprenant encore. Cet ultime morceau d'un livre que j'ai dévoré amène la série vers d'autres rivages davantage tournés vers l'aspect fantastique de la série que je trépigne d'impatience de découvrir. 

Sans complexe ?, manga de IKUEMI Ryo, 3 tomes publiés aux éditions Akata (terminé - 8€05 l'unité)

Tsubomi est une jeune femme sans histoires qui entre tout juste dans la vie active. Alors qu'elle mène une vie banale et sans but, elle apprend que sa cousine, qu'elle a perdu de vue depuis longtemps est devenue une célébrité. Cette nouvelle va alors lui donner un coup de fouet et bouleverser les croyances qu'elle avait établi sur son quotidien. 

J'ai eu la chance de pouvoir lire, il y a quelques années, le sublime Puzzle, né des mains expertes de la grande Ryo Ikuemi et ce titre demeure depuis dans mon esprit de manière permanente, tant il avait su me toucher et même m'impressionner de par son écriture audacieuse et pleine d'originalité. Naturellement, j'avais de hautes attentes concernant Sans complexe ?, qui n'ont malheureusement pas été récompensées. Sans être mauvais, ce titre marquant le grand retour de l'autrice dans nos librairies française n'a pas su me toucher particulièrement et bien qu'il présente l'avantage de mettre en scène une héroïne au psyché intéressant, je dois avouer ne pas m'être sentie investie dans ma découverte, qui d'une façon étrange m'a laissée très froide. La lecture est pourtant fluide et véhicule des messages positifs, qui donnent envie de se dépasser. Je dois avouer avoir du mal à mettre des mots sur mon ressenti mitigé, mais pour résumer la chose, je suis un peu passée à côté, la faute à des comparaisons un peu idiotes à l'excellence de son titre précédemment paru chez nous. Si je dois en retenir du positif toutefois, bien qu'elle n'a pas su se faire apprécier de mon oeil critique, Tsubomi représente une petite touche de nouveauté et je suis heureuse qu'un personnage si "ordinaire" existe, car je suis certaine que nombreuses seront les lectrices à reconnaître un petit quelque chose emprunté à leur propre personnalité.


Horimiya, manga de HAGIWARA Daisuke & HERO, 4 tomes publiés aux éditions Nobi Nobi (en cours - 7€20 l'unité)

Au lycée, il y a deux sortes de personnes : d'un côté Hori, la jolie idole de sa classe, et de l'autre Miyamura, le "geek" renfermé aux airs lugubres. Pourtant, loin des regards et protégé par la discrétion de leur foyer, ils sont tout autre. Que va-t-il se passer lorsque ces deux êtres que tout semble opposer vont découvrir leur secret respectif ?

    À moins que vous ayez passé les derniers mois reclus dans une caverne (pas de jugement, chacun son mode de vie hihi), vous n'avez pas pu passer à côté du véritable raz-de-marée qu'a été Horimiya, pétillante comédie romantique que la récente adaptation animée a propulsé sur les devants de la scène. Sans être réfractaire, je dois avouer que je n'en attendais pas grand chose et, bien que l'on reste sur quelque chose de plutôt classique, j'ai été assez charmée par la fraicheur qui se dégage de ces deux personnalités fortes et par la candeur de leurs interactions, qui s'imposent comme étant toutes naturelles. Tandis que Hori est un personnage calme dont j'ai apprécié la simplicité, les traits de Miyamura, plus originaux, font le sel du manga et apportent un peu de nouveauté à un ensemble très sympathique, amusant et sans prise de tête. Une lecture agréable qui sent bon le printemps et les coeurs qui s'accélèrent au rythme des rapprochements des deux futurs amoureux.

Mobuko no koimanga de TAMURA Akane, 1 tome publié aux éditions Noeve Grafx (en cours - 7€95 l'unité)

    Réservée à l'extrême, Nobuko Tanaka est une jeune étudiante qui, persuadée de n'être qu'un rôle secondaire dans sa propre vie, laisse toujours passer les désirs des autres avant les siens. Pourtant, victime de sentiments naissants à l'encontre d'un de ses collègues, elle s'interroge : un personnage secondaire a-t-il droit à l'amour ?

    Mon histoire avec Mobuko no koi commençait d'ores et déjà sous de bonnes auspices : Akane Tamura, avec son joli trait délicat, est en effet une ancienne assistante de Jun Mayuzuki, une autrice ô combien chère à mon cœur. S'il est effectivement plutôt aisé de reconnaitre quelques traits du passage de son maître d'art dans ses travaux, la jeune autrice ne se cache pas sous ce patronage et développe rapidement un caractère qui lui est propre et si charmant que j'ai passé un délicieux moment en compagnie de personnages si humains et attachants. J'ai vraiment fondu pour Nobuko, à travers laquelle je me suis reconnue sur bien des points, transfigurant cette "lecture doudou" en rapport presque autobiographique de certaines scènes de ma vie. C'était à la fois troublant et tout aussi amusant de voir l'autrice mettre le doigt avec bienveillance sur tant de maladresses. En refermant le volume, j'ai curieusement senti une grande force m'envahir et l'envie, tout comme l'héroïne de dépasser mes petites peurs et cette timidité qui entrave certaines actions de ma vie quotidienne. 

Outre ce caractère personnel qui m'a intimement reliée à l'œuvre, la série a tout d'une agréable comédie romantique amusante, aux personnages centraux comme secondaires rapidement attachants et très bien dessinée. Certaines scènes m'ont réellement enchantée dans leur composition intime - notamment le dernier chapitre, où Nobuko tente de retirer délicatement les lunettes de Irie; un caractère essentiel à mon sens dans une romance digne de son nom et qui est maîtrisé d'une main des plus habiles. Je ne peux exprimer combien j'ai hâte de continuer à suivre, avec autant d'amitié que d'auto dérision, cette adorable héroïne. 


La sorcière aux champignons, manga de HIGUCHI Tachibana, 2 tomes publiés aux éditions Glénat (en cours - 6€90) 
    
    Au fin fond d'une forêt demeure Luna, une sorcière vivant recluse en raison des champignons vénéneux qu'elle sème malgré elle sous chaque pas. Crainte de tout le village, la jeune femme se love dans sa solitude malgré son fort désir de venir en aide aux autres. Un jour, une rencontre lui promet pourtant un tout autre destin que celui qu'elle s'était imaginé...

    Sous sa jolie jaquette faite de vernis pailleté, le nouveau manga de Higuchi Tachibana (l'autrice de L'académie Alice, dont je vous parle un peu plus bas !) est tout aussi magique qu'il l'annonce. J'ai ainsi instantanément été victime de la sorcellerie de cette adorable guérisseuse que l'on a envie de choyer avant toute chose. Je me suis rapidement sentie bien dans cet univers bucolique fantastique, qui regorge d'une richesse que l'on ne lui soupçonnait pas. La mangaka fait preuve ici d'une imagination débordante pour construire un univers empoisonné mais aussi doux qu'une pâtisserie. Ce premier volume est ainsi composé de nombreuses notes, croquis et annotations sur l'environnement de Luna, des bonus enrichissants, mais démontrant surtout l'ampleur du travail tout aussi bien que la grande imagination d'une autrice dont les pieds ne sont certainement pas rivés au sol. J'ai été littéralement enchantée par certains passages d'une grande poésie, notamment l'idée du croquis prenant vie, conférant romantisme et rêverie à une histoire qui était déjà construite comme un véritable conte de fées.

    Le récit, quant à lui, semble se terminer à l'issue de ce premier volume qui pourrait presque se suffire à lui-même. Heureusement pour mon petit coeur comblé auquel une rupture trop brutale avec cet univers aurait été néfaste, l'autrice amène une nouvelle intrigue au cours des dernières pages qui pourrait transformer l'univers de Luna. Je dois bien avouer ne pas tenir en place !


🌙 DÉCOUVERTES & CONTINUITÉS 


L'académie Alice, manga de HIGUCHI Tachibana publié aux éditions Glénat et terminée en 31 volumes (6€90 l'unité)

3/31 tomes lus

   
Parmi les amateurs de manga, beaucoup réservent à L'académie Alice une place de choix, ce qui a toujours beaucoup attisé ma curiosité, petit être faible que je suis. Je me suis autorisée à consacrer l'année 2022 à quelques petites folies et je suis très heureuse d'avoir ajouté ce titre à la liste, car la lecture du premier tome a été un véritable délice. 

    L'introduction du manga est si efficace que j'ai dévoré le tome d'une rapidité qui m'est inhabituelle. Le concept des "Alice" - pouvoirs surnaturels variés qui amènent les détenteurs à se regrouper dans une mystérieuse académie, sans être particulièrement original, est mené de main habile par une autrice que l'on sent aimer profondément les personnages auxquels elle a donné vie. Ainsi, le tout est très vivant et amusant, porté par une héroïne particulièrement rigolote à laquelle on s'attache immédiatement. Malgré tout, Higuchi Tachibana ne semble pas vouloir laisser reposer son titre sur quelques joyeusetés et enrubanne son manga de beaucoup de secrets et d'éléments un peu plus sombres, ce qui m'a ramenée avec délice à un titre qui a tout mon coeur, Fruits Basket. Evidement, la barre est placée bien haute, mais quelques passages, notamment dans le volume 2 avec Mikan et son professeur, m'ont tant enchantée que je ne me fais pas trop de soucis quant à ma future appréciation du manga, que j'imagine bien continuer à être excellente. 

L'apprentie geisha, one-shot de KAMIMURA Kazuo publié aux éditions Kana (12€70)

    Ça n'est pas la première fois que l'immense artiste Kazuo Kamimura met en scène une geisha dans un de ses récits, sans pour autant en faire le centre de son histoire. Avec L'apprentie geisha, sorti en 1974 au Japon, c'est chose faite et l'auteur nous propose de suivre le parcours d'une jeune apprentie jusqu'à sa montée en popularité dans le quartier réservé. Comme à son habitude, l'auteur ne s'embarrasse pas réellement d'un scénario trop rigide, mais laisse son héroïne et ses pensées vagabonder, côtoyer des personnalités inspirantes, curieuses, qui vont former son parcours tout aussi bien que sa carrière. Pour le lecteur, c'est souvent une invitation à contempler les sentiments dans leur caractère le plus brut, non sans poésie.

    Ayant à la fois un grand intérêt pour le sujet et une profonde affection pour cet auteur de génie, j'attendais beaucoup de ce titre mais je dois avouer ne pas avoir été complètement satisfaite. Bien qu'ayant des qualités évidement propres aux talents de conteur du mangaka, le one shot m'a paru plutôt anecdotique, presque dépouillé de toute la poésie qui habite habituellement la plume du dessinateur. Le titre ne m'a donc pas complètement transportée, bien que j'ai aimé sa vision de la geisha, un peu plus nuancée que celle de la "miséreuse" auquel le public est habitué. Ici, O-tsuru a l'envie de devenir geisha et emmène le lecteur de par sa passion. Celle-ci se fait par ailleurs très attachante, peut-être une de mes héroïnes préférées de l'auteur tant sa joie de vivre est communicative. J'ai aimé le fait qu'on ne s'épanche pas sur ses amours, mettant en avant la dualité de ce métier jouant sur les charmes et l'art de l'amour. En reste un joli one shot comportant des scènes particulièrement élégantes, bien que l'auteur ne soit pas forcément à l'apogée de son talent. 

Dans le sens du vent, manga de IRIE Aki, 5 tomes publiés aux éditions Soleil (en cours - 7€99 l'unité)


5/5 tomes lus
        Avec les bourrasques auxquelles j'ai eu le droit en début d'année, mes pensées ont rejoint le tempétueux Dans le sens du vent, un excellent manga sur lequel je n'étais pas à jour dans ma lecture. Le premier volume m'avait particulièrement plu, avec son scénario hétéroclite mais si agréablement surprenant. J'avais alors arrêté ma lecture sur un suspense de grande échelle, avec un Michitaka dont l'innocence était remise en cause par son frère médusé. Qu'elle n'est donc pas ma surprise, en ouvrant le second volume, de constater que l'intrigue policière s'est vue complètement remisée sur le côté, afin de faire part belle à l'aspect touristique du manga. J'ai été plutôt déroutée de ce brutal changement de registre, qui casse complètement tout cette ambiance noire de thriller qui avait été tissée précédemment. Ma reprise avec le titre a donc été difficile, bien que je dois avouer adorer tout ce qu'il m'a appris sur la beauté sauvage de l'Islande. Il m'était de plus compliqué de bouder mon plaisir tant l'autrice a une parfaite maîtrise de ses attachants personnages tout aussi bien que sa plume, offrant de somptueux paysages qui m'ont fait frissonner. 

    Passé cet étonnant tome, la suite de l'histoire reste mieux calibrée et j'ai moins eu la sensation d'une intrigue négligée, la mangaka semblant trouver alors l'équilibre parfait entre les différences facettes de son œuvre. La construction du récit, naviguant dès lors entre d'amusantes tranches de vie, enquêtes et road trip, est si particulière qu'il est difficile de lui résister, au point où plus rien ne me perturbait particulièrement à l'issue du quatrième tome. De toute manière, j'étais trop préoccupée par ces protagonistes parmi les plus charismatiques qu'il m'ait été donné de rencontrer. Aki Irie dispose d'un talent sans bornes quand il s'agit de dévoiler toute la dualité de ses héros, particulièrement Michitaka qui est un antagoniste (?) tellement intriguant et fascinant qu'il pourrait presque être le frère caché de celui de Monster, c'est dire ! Bien qu'il faut peut-être s'accrocher pour saisir toute la beauté atypique de ce titre, je ne peux donc qu'en recommander la lecture.


Divine Nanami, manga de SUZUKI Julietta publié aux éditions Delcourt/Tonkam et terminé en 25 volumes (6€99 l'unité)

5/25 tomes lus
     J'avais profité il y a de cela déjà deux ans (!) d'une grande vague de réimpression de la part des éditions Delcourt/Tonkam pour enfin découvrir le support original de l'anime Divine Nanami qui avait fait fleurir une partie de mes années collèges. Si vous l'ignorez encore, j'aime à égayer mes mois de thèmes de lecture particuliers et janvier se portant sur l'univers fascinant des yokai, ce manga de Julietta Suzuki m'a semblé tout indiqué pour démarrer l'année en douceur. 

  On y suit une jeune lycéenne, Nanami, qui à la suite d'un parcours de circonstances, va se retrouver à gérer un vieux temples miteux et ses quelques habitants yokai, ces esprits japonais dont les originales spécificités ont quelque chose de fascinant pour le lectorat occidental. Entre découverte de cet étonnant monde parfois bien dangereux pour une humaine et la chaleur de son coeur empli de bonté, la série se fait tour à tour extrêmement divertissante, puis très chaleureuse, avec son lot de message d'acceptation de l'autre qui n'a pas manqué de beaucoup me plaire. Nanami tout comme ses "serviteurs" yokai sont très attachants et je recommande vraiment cette lecture pour qui aurait envie de mettre la main sur un titre "boostant", qui donne envie de donner le meilleur de soi-même. 

Kowloon Generic Romance, manga de MAYUZUKI Jun, 5 tomes publiés aux éditions Kana (en cours - 7€45 l'unité)
  
4/5 tomes lus

     
À chaque nouvelle sortie, renouer avec Jun Mayuzuki est un de mes plus grands plaisirs du mois. Depuis la parution française de son superbe Après la pluie, dont la lecture m'avait tant bouleversée et continue de le faire encore aujourd'hui, je me jette sur chaque nouveau tome de son excellente nouvelle série, Kowloon generic romance. Lire cette autrice disposant d'un immense talent et d'une sensibilité rejoignant la mienne demeure ainsi toujours un grand moment de lecture pour moi. Et si je vois sa précédente œuvre comme une gemme absolue, tant elle avait comblé toutes mes attentes, jusqu'à celles que je m'ignorais alors, Kowloon est encore bien meilleur sous plusieurs points de vue, malgré un attachement émotionnel forcément un peu moins grand. 

    Avec son troisième volume, Jun Mayuzuki semble décidée à faire souffrir son lectorat. Étoffant son intrigue de plus en plus nébuleuse, le manga se teinte de beauté tandis qu'il épaissit le mystère entourant les origines de Reiko et sur les manigances que semblent fomenter les habitants du quartier. C'est avec un plaisir sadique que j'ai vu le couple se rapprocher, puis se déchirer, leurs sentiments contraires et leurs incompréhensions les empêchant de vivre ce qui pourrait être.. Ou vivre à nouveau ce qui a été ? L'autrice joue à merveille avec les nerfs du lecteur sur l'ambiguïté étouffant Reiko, sur ce qu'elle a été, sur celle étant peut-être à son origine (est-elle amnésique ou bien est-ce un clone de la vraie Reiko ? Dans quel cas, où est passée l'originale ?), rendant le récit passionnant et donnant à la protagoniste une dimension inattendue et touchante. Le volume entraîne une nuée de réflexions immersives sur le rapport ténu entre la nostalgie et l'amour, mais aussi, donc, sur l'identité, le regard des autres et l'affirmation de soi. Fidèle à ses habitudes, l'autrice joue toutefois habilement avec plusieurs registres, passant aisément du tragique haineux à des scènes plus légères. J'ai refermé le volume, encore en proie à un songe, une fièvre étrange née des envolées ultra-poétiques d'une artiste qui ne cesse jamais de faire rêver. Kowloon generic romance parvient toujours à m'enlever à ma réalité, pour me faire atterrir dans la moiteur de ce petit quartier pittoresque, aux abords un peu insalubres, mais dans lequel je me sens étrangement si bien. Une ambiance que je n'arrive à retrouver nulle part. 

Un pont entre les étoiles, manga de Kyukkyupon publié aux éditions Akata et terminé en 4 tomes (8€05 l'unité)

4/4 tomes lus
    Un pont entre les étoiles aura été une solaire découverte au cours de mes nuits froides d'hiver et bien que j'avais quelques réserves quant à mon appréciation finale, j'ai été surprise de voir mes larmes s'échapper à flot à de nombreux passages ! Si ses capacités lacrymales peuvent vous rebuter, rassurez-vous, le manga possède son lot de qualités, notamment un contexte historique très riche, offrant une vision inédite de la seconde guerre mondiale pour le lecteur occidental. 

    Le manga propose de suivre le parcours de deux enfants voués à être ennemis en raison de leur patrie respective. Entre candeur propre à leur jeune âge et remises en question des valeurs qu'on leur a inculqué, le titre propose des interrogations intéressantes, qui renvoient à l'absurdité d'une guerre provoquée pour des ambitions n'étant pas les leurs. Il était extrêmement intéressant, parfois même révoltant de voir les mœurs évoluer petit à petit, sans jamais inculper un camp ou un autre. J'ai beaucoup aimé voir l'héroïne grandir au fil du récit, observer les fissures dans la sphère de ses convictions. Au final, résulte un très joli message de paix où personne n'est glorifié ni vraiment à blâmer. J'ai eu un petit coup de cœur pour Kyukkyupon, une autrice passionnée par son sujet (né des expériences de sa propre grand-mère) que l'on découvre tout juste en France. Son trait est détaillé, empli d'architectures pittoresques sublimes. Les fortes émotions qu'elle place dans les prunelles de ses candides héros sauront indubitablement vaincre le cœur du plus endurci. À la finale, je recommande chaudement cette série pleine d'humanité et de bienveillance qui m'a enchantée. 

Pour Sanpei, manga de KONO Fumiyo publié aux éditions Kana et terminé en 2 tomes (10€20 l'unité)

2/2 tomes lus
    J'aime beaucoup Fumiyo Kono, bien que "aimer beaucoup" soit une faible association de mots pour exprimer tout le réconfort et la volonté que me donne cette autrice. Aussi, pour commencer mon année en douceur, j'ai décidé de faire de Pour Sanpei ma première lecture de 2022. Je me félicite encore à la fin de l'hiver d'avoir eu ce petit éclair de génie qui m'a clairement accompagnée bien plus longtemps que le temps d'une lecture. Finalement trop bref instant échangé avec un retraité désoeuvré suite au décès de sa femme et qui va devoir réapprendre à vivre aux côtés de son fils et de sa famille, le manga a envahi mes pensées.

    Avec ce diptyque, l'autrice réussit le tour de force de nouer le lecteur avec une personne âgée, peu importe qu'elle soit notre âge au moment de notre rencontre avec ce dernier. A travers son quotidien fait de reprisages et de petits plats, la mangaka mijote un tranche de vie sincère dans lequel la petite famille un peu bancale se fait rapidement une place dans notre coeur, soulevant au passage quelques souvenirs poussiéreux qui ne manqueront pas de laisser un sourire ému sur le visage. J'ai encore une fois été admirative de la force de frappe de Fumiyo Kono, qui touche constamment là où ça fait mal, sans jamais pousser le lecteur dans des retranchements où il se sentirait "forcé" de rendre les armes face aux larmes. Le manga dresse donc un tendre portrait, parfois amusant et didactique même, l'autrice glissant de nombreuses astuces afin de tenir correctement un ménage. Le manga sort alors de son cadre de divertissement pour se métamorphoser en vrai guide de vie à la mise en page extrêmement ingénieuse, en faisant une œuvre hybride absolument charmante. En plus d'un délice réconfortant, subsiste en prime un message positif incitant à toujours aller de l'avant, car les plus belles surprises se cachent souvent là où on les attend le moins. Et si vous ne connaissez pas encore le titre ou bien l'autrice, j'espère que ce manga sera tout cela pour vous. 

Veil, manga de Kotteri, 3 tomes publiés aux éditions Noeve Grafx (en cours - 13€90 l'unité)

3/3 tomes lus
    Comment mieux commencer son année qu'aux côtés de "elle", "lui" et de leurs discussions futiles mais ô combien charmantes ? Après la délectable dégustation des deux premiers volumes, sortis en France en novembre 2020 pour le lancement des éditions Noeve Grafx, il est dérisoire de dire à quel point j'avais envie de poursuivre mes discussions avec ce couple charismatique et sensuel. Ce troisième tome, proposé dans un luxueux coffret "blanc gracieux" ne déroge pas aux règles de charme et de délicatesse qui avaient été érigées en pièce maîtresse par ces prémices ravissants. A mi-chemin entre l'objet-livre, le manga et l'artbook, Veil est encore une fois un délice des sens, une symphonie d'humour si fin que l'on craint d'être de trop entre les regards langoureux que se donnent les deux amoureux, épris de la malice, du velours de la voix taquine et de la sensualité de l'autre. Kotteri est décidément une grande autrice, jouant avec autant de simplicité que de maitrise dans les rapports entre ses deux personnages, formant un duo iconique qui me donne assurément le sourire. Le volume se clôt avec beaucoup de poésie sur un chapitre débordant de romantisme qui a achevé la naissance, non pas d'étoiles dans les yeux, mais bien d'une immense galaxie amoureuse et admirative. S'il y a un manga à ne pas rater ces derniers mois, il s'agit bien de celui-ci. 


    Ici s'achève donc cet immense pavé. J'ignore si vous avez réussi à en voir le bout (si tel est le cas, vous avez tout mon respect héhé), en tout cas j'ai pris plaisir à renouer avec ce format, qui subira surement quelques changements dans les mois à venir. Bien qu'il soit sorti un peu tard et n'est plus tellement de saison, j'espère qu'il vous aura donné un peu d'inspirations pour vos prochaines lectures ou tout simplement donné envie de vous replonger dans ce vieux titre que vous aviez aimé il y a bien longtemps ...

Que les belles lectures accompagnent vos journées et forgent les plus beaux rêves de vos nuits !
Suki. 

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